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Moment de vie
Un père et son fils

Hygiène versus bien-être

À quoi ressemble la salle de bain du XXIe siècle ? En quoi est-elle différente de celle des XIXe et XXe siècles ? « On entend souvent que les salles de bain ont beaucoup évolué ces dernières années, mais ce n’est pas tout à fait vrai. Les premières salles de bain des maisons bourgeoises des années 1930 ressemblent finalement beaucoup à celles d’aujourd’hui, à part dans la déco ! », résume Monique Eleb. Bien sûr, les matériaux ont fait des progrès : ils sont plus performants, de même que les équipements sont devenus plus sophistiqués avec l’apparition de nouvelles technologies (chauffage, robinetterie, etc.), mais cela reste des changements à la marge.

Dans les classes privilégiées de la fin du XIXe siècle, la salle de bain était axée sur la détente, à l’image des nombreuses civilisations qui faisaient la part belle aux bains, hammams, saunas… Chaleureuse, elle était meublée de banquettes et possédait des équipements de douche et de bain sophistiqués. En se démocratisant dans les années 1940-1950, cette salle de bain « à l’anglaise », a cédé sa place à l’approche hygiéniste de la salle de bain américaine. L’aspect pratique et efficace prennent alors le dessus.

Dans la plupart des foyers français, la salle de bain est donc avant tout fonctionnelle et rationnelle, même si certains matériaux plus luxueux comme le bois refont leur apparition. « Ça veut dire qu’il y a encore beaucoup à faire pour reconquérir l’approche détente de la salle de bain ! Cela montre aussi que le rapport au corps change très lentement, et que l’idée même de la détente et du plaisir à encore du mal à faire son chemin dans notre quotidien. »


La taille compte !

L’étude « Entre confort, désir et normes : le logement contemporain » (1) et les enquêtes sur la consommation et le mobilier (2)  mettent en évidence le fait que les Français sont déconcertés par l’achat et l’aménagement de leur salle de bain, notamment à cause de ses dimensions réduites au fil des siècles. Il faut dire qu’avec 3,5 m2 en moyenne dans le logement collectif, les salles de bain aujourd’hui en France sont encore exiguës.

« Un espace détente, des plantes, des douches multijets… Tout le monde en rêve, mais on hésite encore à investir autant pour sa salle de bain que pour une cuisine par exemple », poursuit Monique Eleb. Un impératif de rationalité qui joue aussi sur les choix de décoration : les matériaux – et les mètres carrés – étant coûteux, on préfère opter pour des tons neutres plutôt que de prendre le risque de faire une salle de bain colorée qui ne nous plaira peut-être plus dans quelques années ou qui sera un frein à la revente de l’appartement. Jusque dans les années 1980, on se posait beaucoup moins de questions…

« Un autre exemple de cette contrainte d’espace, c’est la disparition du bidet en France, alors qu’il reste un élément de choix dans d’autres pays.

Une femme se détend dans son bain

Marier l’intime et le convivial 

Monique Eleb débusque un autre mythe moderne, celui de la baignoire au milieu de la chambre. « Au quotidien, c’est plus compliqué. D’abord, ça génère beaucoup d’humidité, et ça nécessite aussi beaucoup de soin : comme elle est pleinement exposée, la salle de bain ouverte doit être parfaitement entretenue et rangée, sinon l’effet n’est pas très réussi ! »

Et puis il y a le besoin d’intimité, toujours très fort aujourd’hui malgré l’injonction à la transparence en vogue sur les réseaux sociaux : « Au XVIIIe et XIXe siècle cohabitaient les notions de toilette publique et toilette intime. La toilette publique, comme son nom l’indique, pouvait être faite en présence de tiers, visiteurs, famille, amis, mais elle ne comprenait que la coiffure et le maquillage. Au contraire, la toilette intime était du domaine strictement privé, uniquement partagé avec le ou la domestique en charge. Aujourd’hui, on peut partager sa salle de bain en famille, mais pas tout le temps. » Même si les parents et les enfants aiment se retrouver dans la salle de bain jusqu’à un certain âge, il arrive toujours un moment où le besoin d’intimité prend le dessus. Idem entre conjoints : il y a certaines choses qu’on n’aime pas forcément partager ! Pourtant, la salle de bain réserve aussi de vrais moments de convivialité : les adolescents – notamment les filles - peuvent passer de longs moments dans la salle de bain avec des ami(e)s pour se préparer à une soirée par exemple, les amoureux s’y retrouver pour un bain à deux, le père et le fils pour partager des secrets de rasage…
 

Un couple dans une salle de bain

Remerciements : Monique Eleb, psychologue et sociologue de l’habitat.


Sources :

(1) PUCA, ministère de la Transition écologique et solidaire, « Entre confort, désir et normes : le logement contemporain », 2012.

(2) Monique Eleb, « Usages, espaces, objets », in Habitatscope 2016, bilan sur la consommation des Français de l’Institut de Prospective et d’Études de l’Ameublement (IPEA) septembre 2015, p.49-53

 

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